Jean-Philippe Accart, Clotilde Vaissaire-Agard, Les 500 mots métiers. Bibliothèques, archives, documentation, musées, Bois-Guillaume, Ed. KLOG, 2016
A quoi bon en 2016 tenir entre les mains un dictionnaire ? Tout le monde semble s’être mis d’accord pour affirmer que ces « bases de données » de papier n’ont plus d’avenir: les enfilades d’Encyclopaedia Britannica et l’Encylopaedia Universalis ne sont plus imprimées depuis plusieurs années. Quant au Petit Robert, bien moins encombrant mais riche de 300’000 définitions, il résiste mais est désormais accompagné d’une clé USB pour permettre une consultation en ligne.
En quelques 200 pages, Les 500 mots métiers est une réalisation de salut public dans un environnement saturé d’information et adepte des superlatifs: croissance exponentielle des contenus, des échanges, de la taille des données… Ce lexique, utile et synthétique, contraste avec l’immensité des ressources d’Internet. Il tranche aussi sur l’infinie variété des discours, qui conduisent parfois à faire perdre de vue que les mots ont un sens et qu’il est bon qu’il soit valable pour tous. La sélection draconienne des entrées crée un ensemble aisément maîtrisable. Cet aspect est très précieux dans un univers où l’on dit manquer de repères.
L’interdiscipline
Un autre mérite des auteurs est de dessiner le champ (inter)disciplinaire de quatre métiers ayant pour fondement ou corollaire la gestion de documents, au sens d’ « élément de connaissance ou source d’information ». S’il y a bien une avancée due à Internet, c’est de permettre la convergence d’institutions, quelles que soient leurs traditions particulières, autour de la thématique de la documentation. Cela constitue un progrès incomparable pour le chercheur. Un nouvel acronyme, GLAM (pour Galleries, Libraries, Archives et Museums), signale d’ailleurs les initiatives visant à relier des ressources et bases de données dans ces domaines. Grâce au langage XML, au Web de données et au Web sémantique (voir ces mots dans le livre), les bases de données constituées de façon autarcique dans chaque univers professionnel peuvent enfin se combiner entre elles, enrichir et partager leurs informations.
Le contenu
Le tour de force de ce volume est de proposer pour chaque entrée une définition à la fois concise, précise et nuancée. Par exemple l’entrée « ontologie » – qui a acquis un sens précis et technique dans le domaine de l’information – rappelle la parenté de ce mot avec la notion traditionnelle de « thésaurus », mais obéit à « des règles plus contraignantes pour réduire le risque de mauvaise interprétation avec les machines ». Associer des concepts récents à des concepts plus anciens permet d’en mesurer facilement la portée et souligne qu’ils ne viennent jamais de nulle part.
Autre exemple, le terme « information » est sobrement défini comme « connaissance ou élément de connaissance formalisé ». Cette formulation, suffisante pour les professionnels de ce domaine ne doit pas faire oublier que ce terme fait l’objet de discussions infinies sur son sens et sa portée, d’un point de vue philosophique, économique ou sociologique, dans un monde qui s’est désigné comme société de l’information.
L’illustration est également présente, que ce soit par des schémas (comme celui du modèle FRBR ou le tableau des licences creative commons), des copies d’écran (comme la présentation d’un index KWIC) ou encore quelques photographies. Figurent aussi bien des dispositifs actuels que des technologies traditionnelles, voire celles d’une époque révolue: personnellement je n’ai jamais côtoyé une carte à fenêtre!
Toutes les entrées sont traduites en allemand et en anglais, listées alphabétiquement en annexe dans chacune de ces deux langues, afin de retrouver aisément toutes les équivalences. Enfin, une « bibliographie-webographie » mentionne les principales ressources lexicographiques sur lesquels les auteurs se sont appuyés.
(Voir aussi l’interview des deux auteurs par Archimag à propos de la genèse des 500 mots métiers, sur le site de Jean-Philippe Accart)
Bonjour monsieur Rivier, et merci pour votre article très complet.
La carte à fenêtre, je l’ai encore côtoyée cette année, dans les archives d’une entreprise du secteur de la mécanique qui garde ainsi la mémoire de toutes ses pièces fabriquées jusqu’à la fin des années 90. Se pose aujourd’hui la question de leur numérisation (non pas à cause du support lui-même mais à cause des lecteurs de cartes dont les lampes deviennent impossibles à trouver). Pour plus de 700 000 cartes, ça n’est pas un petit projet ! Depuis les années 2000 les plans de pièces sont tous nativement numériques, ce qui n’est pas la fin des soucis pour la conservation long terme… mais c’est une autre histoire 🙂
Les techniques documentaires sont d’une infinie variété, merci pour votre explication. Comme je le comprends, la numérisation des cartes à fenêtre comporte deux niveaux: celui de la microforme insérée dans la fenêtre (très haute résolution nécessaire avec un scanner équipé pour numériser les transparents) et celui de la fiche elle-même avec ses métadonnnées (résolution habituelle, comme pour un document normal). Joli défi en effet!